Mathilde Tahar & Pippo

 

ph. Amedeo Abello
texte par Clara Bouteille

 
 

Sous la neige ou sous la pluie, Pippo le border collie et Mathilde partent courir des kilomètres ensemble. Pendant ce temps, Étincelle le chat de la maison, reste au chaud, dans le lit, à attendre le retour de Mathilde. À chacun son moment !

 
 
 
 

Une très bonne “mauvaise décision” !

« Je suis professeur de philosophie. Actuellement je fais ma thèse en philosophie de la biologie, qui à l’origine traite sur la théorie de l’évolution. Je m’amuse à dire que d’ici l’année prochaine je m’orienterai davantage sur le comportement animal, qui n’était absolument pas le sujet principal de ma thèse. 

J’ai un chat depuis 12 ans, Étincelle, c’est un nom absolument atroce choisi par mon copain de l’époque. J’ai aussi un chien, Pippo, depuis 3 ans.

Étincelle et Pippo, c’est compliqué. Ou plutôt, ça a été compliqué. C’est un chat d’appartement qui aux alentours de 9/10 ans a vu pour la première fois un chien : Pippo. Il m’est arrivé de retrouver Pippo à la maison avec la truffe quelque peu ensanglantée… Certains de mes amis me montrent des images de leur chien et chat se câlinant : Nous ne sommes pas du tout sur ce genre de relation. Avec le temps, ils s’entendent mieux. 

Enfant, j’ai eu des chats, ma mère les aimait beaucoup alors, il y a toujours eu un chat à la maison. En revanche, je n’avais jamais eu de chien, certainement parce que mes parents ne voulaient pas des contraintes que ça apporte. 

Ainsi, quand j’ai pris Pippo, je n’avais aucune connaissance dans le domaine canin. Ça s’est avéré être une très bonne “mauvaise décision”. Aujourd’hui, ma mère se plaît à dire qu’elle n’aime pas les chiens sauf Pippo. »

 
 
 
 

Quand les espèces se rencontrent…

« J’ai lu des livres sur le comportement animal depuis l’adoption de Pippo. Contrairement au chat qui est un animal autonome, le chien demande une réelle éducation pour la vie en société. Ces lectures m’ont profondément remise en question sur ma façon d’interagir avec mon chien. Évidemment, j’ai fait beaucoup d'erreurs au début. 

Donna Haraway, l’auteur de “Quand les espèces se rencontrent”, dit que nous pourrions faire preuve de politesse à l'égard de nos animaux : en acceptant que nous ne savons pas ce qu’ils pensent mais que nous pourrions supposer qu’ils comprennent beaucoup plus que ce qu’on leur accorde. C’est quelque chose que j’ai aimé développer avec Pippo, et qui m'a indirectement menée à créer, durant le temps libre de la période de covid, son propre instagram @pippolechienfou. »

 
 
 
 

Qu’il neige, qu’il vente ou qu’il pleuve on part courir…

« Je cours énormément. C’est une pratique pendant laquelle j’aime ne pas avoir à parler avec quelqu’un.

Quand j’ai pris Pippo, je me suis renseignée sur les races qui seraient capables de me suivre sur quelques kilomètres. Aujourd’hui, qu’il neige, qu’il vente ou qu’il pleuve on part courir. Avant je ne courais pas par mauvais temps, c’est quelque chose que j’ai développé avec mon chien. On court 4 à 5 fois par semaine, rarement en dessous de 10 km. Durant les premières minutes d’une course, il fait n'importe quoi… Jusqu’à ce qu’il se concentre. Il y a très peu d’autres moments où nous sommes autant liés. 

J’ai développé une approche différente de la course: avant j’étais dans la performance, aujourd’hui je fais attention à lui, on s’arrête de temps en temps pour qu’il boive ou qu’il mange un bout. Il lui arrive aussi de venir me pousser comme pour me signaler qu’il est temps que je boive. On court au canal Saint Martin parfois jusqu’à Sevran. La course, c’est notre moment. »

 
 
 
 

Cette fois-là…

« Étincelle avait quelque chose à la bouche, en pensant qu’elle avait un abcès, j’ai consulté le vétérinaire. Ils ont décidé de la garder toute la journée, sans me dire ce qu’elle avait. L’attente me rendait un peu folle, alors je suis partie courir avec Pippo. (Je n’ai jamais mon portable quand je cours, mais ce jour-là, dans l’attente des nouvelles du vétérinaire je l’ai pris). Nous étions à plus de 10 km de chez moi quand j’ai appris que mon chat étincelle avait un cancer sans guérison possible. Évidemment, les larmes ont coulé, mais il me fallait vite rentrer chez moi. Alors nous sommes repartis. Pippo est en général devant moi pendant une course, et cette fois-là, il est resté collé à moi tout au long du retour, il me léchait les jambes. C’était un moment très particulier, très émouvant. Depuis, Étincelle est très affaiblie par la maladie et Pippo passe ses journées à la suivre, à la couver. »

 
 
 
 
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